LETTRE AU LECTEUR 22
L'Europe, prémonition du monde à venir //
Il est une façon de décrire l'Europe qui se situe au-delà des prises de
position partisanes et politiciennes, celle qui visualise le
développement de l'Union européenne comme une prémonition du monde à
venir.
Anciennement, prémonition signifiait une sorte d'intuition plutôt
funeste de ce qui allait arriver. En l'occurrence, l'Europe vue comme
prémonition de la nouvelle organisation du monde ne l'est pas funeste
mais plutôt exaltante.
En tout cas si l'on retient la manière dont elle est jugée de
l'extérieur. L'Europe c'est alors le parti pris d'un chemin de
civilisation avancée: primauté de la paix, de la démocratie et des
droits de l'homme, de la femme, des enfants, en fait des droits des
humains, ou bien de la personne comme dit Simone Iff. Mais aussi
priorité à la négociation, respect des peuples et des individus, parité
homme-femme, affirmation de la tolérance, reconnaissance de la
différence et des minorités etc etc... (1)
C'est le chemin de la paix en ce que l'Europe à mis fin à la guerre
entre voisins. L'Europe oui a banni l'idée de cette guerre-là qui la
minait depuis des millénaires comme elle perdure ailleurs dans le
monde. (2)
En fait un chemin menant sûrement à ce qui pourra arriver de mieux au
monde si ce chemin-là se généralise autant qu'il s'intensifie et se
solidifie en Europe et partout.
Ce qui donne cette particularité à l'Europe, davantage par exemple
qu'au Canada, c'est que ce projet de civilisation est porté par un
ensemble de nations construisant par étapes une histoire en devenir.
Bien sûr, l'Europe comme modèle du monde est déjà effective, ainsi des
unions régionales en Asie, en Afrique ou en Amérique du sud tentent de
s'organiser à la manière de l'Europe... Qui plus est, quantités
d'étudiants du Pakistan, de Chine, d'Afrique et d'ailleurs rêvent de
cette Europe essentiellement libérale, pas au sens économique, mais au
sens des libertés de penser, d'être et de se développer. Et des
libertés de croire ou de ne pas croire, de savoir, dire et vivre hors
des oppressions de toute nature.
Prémonitoire d'un monde à venir également, en ce que le développement
de cet espace européen se fait sans expansionnisme hégémonique puisque
ce sont les peuples qui souhaitent rejoindre l'Europe et non l'Europe
qui les impérialise.
A ce titre son extension, déjà engagée avec l'élargissement au 28, est
prévisible à toute l'Europe continentale (les Balkans,
l'Ukraine...), donc y compris à la Turquie de plein droit. C'est
d'ailleurs le meilleur argument de soutien à l'adhésion de la Turquie,
que l'Europe est prémonition de l'organisation à venir du monde dans
toute sa diversité.
De plus la réalisation de cette prémonition devrait logiquement
s'opérer par influence quasi communicative conduisant peu à peu les
voisins de l'Europe, et les voisins de leurs voisins, à adopter cet
ensemble de valeurs européennes qui participera à l'émergence de
standards mondiaux de civilisation globale.
Au fond ce qui a pu être le rêve de certains pro-européens des origines
(3), et aussi le cauchemar des anti-européens de toujours (l'ex-URSS et
ses partisans voyaient en l'Europe de la CEE une fabrication
américaine) est certes largement dépassé mais pas réduit du tout à un
mirage dégonflé.
Bien au contraire. Car s'il pouvait être confortable d'imaginer une
Europe construite, façon États-Unis, sur un corps solide d'une douzaine
de nations, il est bien plus enthousiasmant et bien plus intéressant,
et surtout bien plus important pour l'humanité que l'Europe se
construise dans la perspective de l'organisation du monde à venir.
1)
C'est sous la ferme pression de la commission européenne, début 2006,
que la France va devoir fermer un centre de détention, appelé dépôt et
qualifié d'indigne du pays des droits de l'homme, situé sous le palais
de justice en plein coeur de Paris, et non par suite d'une action des
partis politiques nationaux.
(2) La crise en
Géorgie de l'été 2008 devrait rappeler à ceux qui accusent les
européens europhiles d'être des traumatisés des guerres qui n'existent
plus, que la guerre est toujours possible, là maintenant et pire
éventuellement.
(3) On dit que l'Europe se construit sans tenir compte de l'avis des
peuples, mais on oublie que L'Europe n'a pas été faite par les peuples,
ce sont quelques individus d'abord, puis quelques mouvements de
minorités actives qui en sont à l'origine...
13/12/04 / tous droits réservés / texte reproductible sur demande / maj 06/03/2014
accueil lettre au lecteur