"On
va droit dans le mur", disait le slogan catastrophiste
des années
dernières, en fait on va droit dans le numérique dont
l'expansion
s'accélère à grande vitesse.
Cette
année un département français -la Corrèze- a offert à
tous ses
élèves de 6eme une tablette i-pad... Les
collections permanentes du Centre Pompidou sont
désormais visibles
en ligne... la Scam comme d'autres institutions diffuse en
direct ses
soirées sur son site web... Les télés proposent leur replay etc.
A
San Antonio, Texas, une nouvelle bibliothèque universitaire ne
propose plus aucun document imprimé, confirmation: aucune édition
papier. Il est vrai qu'elle n'est pas littéraire mais spécialisée
en sciences et techniques de l'ingénieur. Une
autre bibliothèque universitaire américaine a détruit
l'ensemble
de ses documents papier après les avoir numérisés,
essentiellement
des magazines.
Entre autres avantages, dit-on, le format en ligne permet à
plusieurs étudiants d'accéder en même temps au « même
volume ». On
ajoute
que les bibliothécaires qui n'ont plus à ranger les étagères
peuvent conseiller les lecteurs. Cependant puisque les
documents sont
accessibles en ligne, et pas seulement dans les locaux de la
bibliothèque, on ne sait plus très bien à quoi serviraient
les
bâtiments des bibliothèques et pourquoi on s'y rendrait!
On
annonce que les universités françaises se convertissent
au
numérique, en fait elles se mettent à diffuser des cours
en ligne.
Bon, mais attention, à la différence des universités
américaines,
les françaises les diffusent seulement sur identifiant
et mot de
passe!
C'est
qu'il y a des résistances françaises au numérique. Par
exemple,
alors
que
sur les télés anglaises les présentateurs se servent de
leur
ordinateur à l'antenne, les français ont toujours leur
rame de
papier qu'ils réordonnent d'un geste rituel durant le
générique de
fin.
Ce n'est pas grave, pourquoi pas? Sauf que c'est
symptomatique
de résistances fortes au numérique qui s'expriment
également
beaucoup dans l'Éducation nationale où l'équipement en
tableau
numérique est très très faible et où il est toujours difficile
de
communiquer par e-mail etc. Il a fallu une grève l'an
dernier pour
pousser à la diffusion de cours en ligne, restée on le
craint à
l'état d'expérimentation...
Cette résistance marque selon
moi
l'insécurité dans laquelle la transformation numérique place
les
« élites » culturelles.
Sinon pourquoi
persistent-elles
à se défier d'internet, désormais à la disposition de 2
milliards
d'humains?
Une partie d'entre elles ne sait pas ou ne veut pas
s'en
servir. Une autre partie qui sait très bien s'en servir, veut
garder
les droits ou bien le pouvoir. Car internet, perçu comme une forme de dilution des sources, parait réduire le
pouvoir des clercs qui ne veulent surtout pas le perdre, ce qui
est
compréhénsible lorsqu'on a une position à la radio, et la télévision et dans l'édition papier, et où encore?
Comment
expliquer
sinon les propos du philosophe Raphaël Enthoven pour qui "internet
n’est le lieu ni de l’échange ni du désaccord, mais du
consensus, de l’unanimité et, donc, de l’invective et parfois du
lynchage". Alors qu'il est
pourtant
un espace de liberté pour beaucoup d'auteurs, d'indépendance
en
tout cas par rapport aux pouvoirs qu'ils soient politiques,
universitaires ou éditoriaux.
Faut-il
perde son temps à répondre à ces contestations du numérique? Ce n'est
pas sûr, d'autant que beaucoup disparaissent avec le temps. Comme
l'argument selon quoi internet serait une perte de temps alors qu'il en
fait gagner pour tout et notamment pour l'accès aux documents.
Ou
comme cette question en forme de débat: "internet rendrait-il bête?"
qu'un groupe de philosophes, soutenu par des journalistes, ont essayé de lancer, sans succès...
Une autre manière de comprendre cette résistance réside dans une
affirmation répandue: « la technique pose beaucoup de problèmes ».
En réalité elle
permet d'en résoudre, de ces problèmes qu'on ne posait pas tant il était
clair qu'on avait pas de solutions... Ainsi le numérique apporte des solutions à des problèmes qu'on mettait de côté.
Plus simplement: La voie numérique est enthousiasmante parce qu'elle multiplie les
possibilités.
01/03/2011 - tous droits réservés / texte reproductible sur
demande /
m. à j. 08/03/2011 -