2012 // 2011 // 2010 // 2009 // 2-08 // 1-08 // 2-07 // 1-07 // COMP'ACT 06 m'écrire
Le 12 décembre 2011 (et non pas 1914), Télérama titrait : George Steiner :
“L'Europe est en train de sacrifier ses jeunes”.
Voilà une
annonce fracassante que je ne peux guère comprendre. En effet cette
affirmation aurait dû être écrite en 1914 ou en 1939, avant et à
propos de ces périodes où l'Europe a effectivement sacrifié ses
jeunes. Ou bien durant la guerre d'Algérie, dans les années
soixante, pour la France, quand les jeunes gens faisaient 27 mois de
service militaire, ou pendant la guerre du Vietnam pour les USA...
« Grand érudit, poursuit
Télérama dans son chapeau,
George Steiner incarne l'humanisme européen. Il regrette que
littérature, philosophie et sciences ne communiquent plus entre
elles. Comment comprendre notre monde, s'interroge-t-il, si la
culture se rétrécit. »
Faut-il rappeler que jamais autant de livres ont été écrits et
vendus, qu'en ce début de 21e siècle, qu'il n'y a jamais eu autant
de fréquentation de cinémas, d’entrées au musée, de places de
chercheurs. Ni jamais autant de colloques réunissant spécialistes de
différentes disciplines... Que le savoir mis à disposition ne cesse de
s'accroitre en termes de connaissances autant que d'informations.
Et
que de surcroît la consultation de ce savoir est possible. Et possible
quasi
immédiatement.
En fait, une assertion raisonnable serait : on revient de loin, si
on considère tout ce qu'on n'avait pas !
Avant, Dieu s'occupait de tout. Du
monde, des hommes, des oiseaux et du ciel. Désormais les humains
s'en préoccupent et de bien d'autres choses, de l'éducation de
chaque enfant de la Terre ou presque, jusqu'à s'affairer pour
maintenir la biodiversité.
Il se réunissent pour décider de
limiter l'accroissement de la température à 2 degrés à horizon
2020/2050.
Ils se demandent ce qui va se passer
si la banquise fond, et surtout si le permafrost à son tour fond en
dégageant des quantités de carbone dont il y a déjà trop...
Ils s’échinent à trouver des
solutions pour sauver la planète quand auparavant ils ne faisaient
que prier Dieu de faire tomber de la pluie ou au contraire d'arrêter
les flots. Certains persistent à préférer prier, personne ne fait
plus vraiment appel au diable.
Mais
qu'ils se préoccupent de contrôler la température de la terre, il
faut le savoir, était proprement inimaginable il y a encore quelques
années...
Une soirée de lecture à Montparnasse, chez Monique
Stalens. Les lectures de textes en soirée privée, en appartement, sont
toujours précieuses et an-ordinaires. On s'y sent autrement qu'un
spectateur de salles, plutôt invité privilégié. Du coup porté à une
écoute particulière.
C'était un peu plus qu'une lecture en l'occurrence, oui une soirée de
théâtre. De jeunes comédiens -dont Aurélie H. qui m'avait invité-
livrent avec passion un texte de Gombrowicz. En VO, langue polonaise
qu'hélas je ne comprends pas.
Je suis réduit à l'écoute de la langue comme il a pu m'arriver étant
adolescent, à Londres, Regent's park, à la représentation d'un
Shakespeare. Je ne comprends pas le mot à mot. J'en entends certains
qui reviennent et se répètent... Je suis sous la pression du jeu des
comédiens dont le rapport au texte m'échappe. Je « suis » les
expressions des corps et des visages. Parfois on touche au tragique,
par instants je me sens transporté dans Dostoïevski ou dans Eisenstein.
Parfois on est manifestement dans le comique, je me sens figurant dans
un salon de Tolstoï. J'ai cru à un moment retrouver mes impressions de
lecture de Michel Strogoff, dans la collection verte...
Je crois aussi capter la voix de Gombrowicz telle qu'elle m'était
apparue dans son « Journal », dernier texte de lui lu durant
mon séjour en Argentine, la dernière année du 20e siècle.
C'est
un accès difficile à Gombrowicz, mais c'en est un, le seul autre étant
de lire ses traducteurs, ce qui n'est pas non plus un accès direct.
Voilà, c'est
la fin, on applaudit comme si on était au grand théâtre. Et puis on va
se parler. Les comédiens viennent dire bonjour. On parle avec Monique
S. qui, tout le temps de la représentation, a enregistré sous un calme
apparent les moindres mouvements de ses comédiens, à qui elle en rendra
compte à la prochaine séance de son atelier théâtre.
Dans son milieu, il dit...
Dans mon milieu, confie l'écrivain,
voulant signifier : « dans mes livres ».
Parlant de ce milieu que forment les personnages de ses romans, de
ses récits, de ses textes, de ses fictions...
Certains d'entre eux, de ce milieu-là, comme des comédiens de la vie,
réagissent vivement,
quand on leur sort : « mais pas le moins du monde, je vous
assure, pas le moins du monde ! »
Ils ont en effet la vivacité de répliquer : « et le
plus alors, le plus du monde, qu'en faites-vous, s'il vous
plait ? »
Dans ce milieu, dit-il, les gens sont comme ça.
Pas de chance avec le théâtre l'autre
jour. Je vais voir le film de Polanski qui a scénarisé une pièce
de Yasmina Reza. Franchement, j'ai trouvé ça lourd. Surtout j'ai
vécu une expérience curieuse. A différents moments j'ai ressenti
que l’un des personnages comédiens aurait dû claquer la porte,
dire : j'en ai marre je m’en vais. Oui, mais il ne le pouvait
pas puisqu’il était dans l'instance du théâtre, et pas dans celle
du cinéma où la caméra aurait pu le suivre dans la rue, le montrer
s'enfuir dans le parc voisin...
En rentrant, je regarde sur Arte.tv
l'enregistrement de « Rêve d'automne » de John Fosse par
Chéreau. En fait, je voulais regarder et entendre Bulle Ogier, que je
n'avais
pas vue depuis longtemps. Sans doute pourquoi je m'impatiente,
d'attendre Bulle, pourtant les acteurs sont excellents. Bon, je ne
peux pas m’empêcher de penser qu’ils font du théâtre,
indépendamment du texte. Oui mais je m’impatiente trop. Je perçois
que Fosse fait aussi du théâtre, à mesure que je perçois quelque
chose de vieux dans tout ça. A cause des décors, de la mise en
scène ? A cause du théâtre qui est surjoué...
Il faut dire que le dernier
spectacle que j’avais vu au théâtre, c’était « Je peux /
Oui » de Yves-Noël Genod au Théâtre de la Cité Internationale,
Paris 14e, qui m'a transporté dans une sorte
d'exaltation jouissive. Evidemment pas pour rien dans le fait d'avoir
trouvé si vieux le Chéreau!
« Pour expliquer les difficultés
de l’époque, « on » nous avait fait le coup de la
crise. Tout venait des fichus chocs pétroliers...
La crise existait
à ce moment comme à d'autres, avant il y avait eu la crise du
régime, mais aussi celle du logement, de la décolonisation, de
l’agriculture, de la monnaie etc. Il y aurait plus tard la crise de
l'enseignement puis celle du chômage.
Encore ne faudrait-il pas
oublier la crise de la famille, dans les années soixante, ni la fameuse
crise de foi,
autrement dit la crise des religions...
Comment ne pas citer surtout la
crise de confiance qui revenait régulièrement ? » (in Les
voyageurs modèles, éditions Comp'Act 2002)
L'observateur
aux nerfs d'acier, le libre penseur libéré, l'humain numérique de ce
21ème siècle reste coi, tend le dos, garde son sang froid même s'il
l'aime chaud.
Il attend que le temps passe tandis que ne se produisent peut-être pas
les catastrophes tous les jours annoncées à grand renfort de clichés
repris sans aucune fatigue.
Le scénario noir prédit pour dans les jours qui viennent. La semaine de
la dernière chance avant le chaos. La déclinaison hebdomadaire de ce
qui pourait arriver si on ne change pas tout de suite. La catastrophe
inévitable vers laquelle on fonce, droit dans le mur, comme des
somnanbules qu'il ne se sent pas être.
Il résiste à la rumeur et recoupe les infos. Il depiste les titres
ravageurs qui sensationnalisent les contenus jusqu'à en deformer
parfois entièrement le propos.
Il relativise les événements qui surviennent en effet et qui ne
s'étaient « jamais » produits, en tout cas pas depuis
quelques années, deux décades, pas depuis les premières statistiques.
Il garde secret comme un trésor le slogan d'une nuit :
« ligne d'horizon à trente ans de préférence »...
Au théâtre, un personnage s'exclame « Donnez-nous notre
meurtre quotidien ! ». Et la phrase slogan parle bien aux
spectateurs, à majorité des abonnés à une saison de spectacles.
Il est évidemment beaucoup plus difficile d’expliquer que si en
effet on est abreuvé par les médias d'un fait diver par jour, donc
dans les 365 par an (et plus pour compter les moins spectaculaires
qui sont passés sous silence), c'est en réalité une indication
selon quoi notre période actuelle est moins meurtrière qu'il y a un
siècle par exemple.
Le nombre d’homicides en France était ainsi bien supérieur à
1000 par an au début du 20ème siècle et il est globalement resté
à ce niveau jusqu'aux années 1980 quand pourtant la population
augmentait de près du double.
Il est encore plus contre-intuitif de souligner qu'à partir des
années 1990 le nombre des homicides a diminué en France de façon
significative, tout comme dans différents pays d’Europe
occidentale et au Canada.
Conclusion : depuis au moins trente ans, il y a moins de
meurtres dans ces sociétés, on s'y tue moins.
Autre conclusion : au théâtre, et ailleurs bien sûr, on
balance parfois des
phrases qui font plaisir parce qu'elles ont une apparence de dire des
choses vraies et fortes, alors qu'elles disent en réalité des
faussetés.
Il parait
que dans les régimes non démocratiques, comme la Chine, on sent un
élan vers la démocratie. Contrairement à ici, en France, où on
est censé être en démocratie mais où on ne sent rien de ce
mouvement démocratique.
On
pourrait appliquer le raisonnement à d'autres critères. Par
exemple, l'Iran est un pays qui ne connait pas la liberté sexuelle.
Mais on y sent une grande aspiration à cette liberté, ce qui peut
se comprendre. Alors que chez nous, ici, on a la liberté sexuelle
mais on ne vit pas ce vent de liberté !
A qui la
faute ?
Le 5 Octobre à 11 heures, comme beaucoup d'autres amis, je suis allé
assister au dévoilement de la
plaque 5 rue St Benoit Paris 6e, en hommage à Marguerite Duras.
Entre autres, parce qu'une fois, sortant de chez elle, elle
m'avait dit : « tu vois, un jour il y aura une plaque sur
cette façade »...
Elle
en avait rigolé, elle avait ri, elle avait plaisanté de cette
manie parisienne qui s’appelle la "plaquite".... Il n'y a donc pas de
raisons de se demander ce qu'elle en aurait pensé. Toutes raisons au
contraire de se réjouir de cet hommage, encore qu'une autre plaque
fixée au bord opposé de l'immeuble indique: ici a vécu le poète
untel que personne ne connait plus.
Toutes
raisons de s'en réjouir néanmoins, même si les autorités
parisiennes auront attendu
plus
de quinze ans pour s'y mettre, tandis que ses livres et son théâtre
n'ont pas cessé de se diffuser.
Il y a des expressions qui
surviennent de façon régulière et répétitive dans le discours
médiatique, certaines sont très anciennes et très éloignées de
notre présent. Elles sont pourtant reprises avec une grande
facilité, sans la moindre occurrence au sens premier. Les exemples
sont nombreux : lâcher la bride sur le cou, c'est là où le
bât blesse, chercher un bouc émissaire et, surtout, ces temps
derniers, ouvrir la boîte de Pandore.
Pandore qui donc était une
femme envoyée par Jupiter pour punir Promothée... dotée d'un boite
contenant tous les maux de l'humanité.
Je prétends que ces expressions métaphoriques embrouillent les
choses par leur raccourci au lieu d'expliquer quoi que ce soit.
Elles sont pourtant utilisées par des experts, analystes ou
spécialistes qui masquent ainsi leur incapacité à formuler.
Paradoxe de la crise, les populations des pays dits
émergents sont majoritairement optimistes tandis que celles des pays
riches sont très pessimistes sur l'avenir. Seule la population du
Pakistan est divisée à 50% sur l'issue des années à venir. Mais au
Nigeria ce sont 70% des gens qui s'attendent à des jours meilleurs.
Les populations les plus pessimistes sont celles du Japon, de la France
et du Royaume Uni. Moins de 10% d'entre elles voit l'avenir en rose,
tandis qu'une forte majorité s'attend au pire.
Paradoxe ou non, ce qu'on appelle la crise est donc une crise de pays
riches, qui survient dans la zone la plus riche du monde, même si elle
a ses pauvres qui ont la vie encore plus difficile.
Apparemment, les seuls à ne pas s'en rendre compte sont les Européens.
Comme dit le Président russe, l'Europe peut très bien régler ses
problèmes toute seule, ce que pensent également la Chine ou le Brésil
qui ont d'autres problèmes à traiter.
Car il n' y pas de crise, il y a des problèmes. Et pas plus graves que
beaucoup qu'a pu connaitre l'Europe : l'inflation des années 1930,
les grandes guerres, les épidémies, la décolonisation, l'exode rural,
la crise du logement, de l'agriculture, les crises pétrolière,
monétaire, politique etc.
Paradoxe encore, dans cette crise, tous les analystes et autres experts
« savent » ce qu'il aurait fallu faire, disent haut et fort
ce qu'il faudrait faire, de ce qui ne se fait pas néanmoins.
On finirait par comprendre que le point déclencheur est toujours
« comment à un moment un pays membre trop endetté peut financer sa
dette à un taux de crédit raisonnable » ?
Question finalement très technique qui semble buter sur les traités
existants, si la banque centrale européenne peut financer les banques à
presque rien, elle n'est pas autorisée à financer les Etats. Qu'elle
s'y autorise donc, comme disait Lacan.
Et qu'on cesse de nous rabâcher cette fable de la crise !
« Les
droits linguistiques et administratifs spéciaux dont bénéficient
les milliers francophones vivant dans la périphérie flamande de
Bruxelles vont être supprimés pour la plupart d'entre eux, ainsi
que le demandaient les Néerlandophones depuis des décennies. »
(presse)
Je
ne prendrai surement pas partie dans cette affaire très compliquée,
sachant en outre que les Flamands ont connu dans l’histoire leur
part d'oppression. Mais je prétends que les droits linguistiques et
administratifs des minorités devraient être respectés partout et
même dans la périphérie
flamande de Bruxelles.
Je
dois avouer que je trouve affreux de vouloir
supprimer ces droits-là. Et, en plus, très ethnocentré !
Autrement dit, ce devrait rapidement devenir incompréhensible pour
beaucoup de descendants.
Deux villages de Nouvelle Guinée sont sur le point d'entrer en
guerre, le chef d'un des villages ayant été tué au cours d'une
dispute. Ils entrent en négociation, il faut compenser soit par des
coquillages, ou des femmes, ou bien des cochons. Ce sera des
coquillages et de l'argent. Les femmes, ça se fait plus...
Deux
tribus modernes négocient un échange de prisonniers, ce sera un
soldat enlevé contre un millier de condamnés en prison (parfois à
plus de 400 années). Étant entendu qu'un certain nombre seront
bannis, le bannissement est une pratique très ancienne, revoir
l'Antiquité. Ce n'est pas
qu'un homme de telle tribu équivale à 1000 de l'autre. C'est la
donnée de la négociation, la base d'un rapport de forces...
Dans
des pays de démocratie apaisée, les chefs de partis se préparent à
la guerre du pouvoir visant à s'en emparer. A part coups fourrés et
tromperies souterraines, les armes fatales étant absolument
interdites, ils régleront leur bagarre en organisant des élections
auxquelles sont conviés tous les habitants de plus de 18 ans dès
lors qu'ils sont inscrits sur des listes préétablies...
« ...Tandis qu'en
mil-neuf-cent-soixante-et-un, par
exemple, on a rien su du bilan de la répression d'une manifestation
interdite à Paris, organisée par le FLN algérien, c’était dans
la nuit du 17 au 18 octobre. On aurait retrouvé des dizaines, on a
même dit des centaines de corps dans la Seine, on ne le sait
toujours pas précisément. Le secret a pourtant été levé dans les
années quatre-vingt-dix, un rapport est seulement parvenu à la
certitude d'un chiffre dépassant les deux cents corps retrouvés
durant l'année entière...
Les manifestants arrêtés sont
rassemblés le mains en
l'air avant d'être dirigés par autobus vers le Palais des sports,
centre de contrôle d'identité... Ils étaient partis 20000, 11538
seront appréhendés...
C'est tout ! Rien sur les morts
éventuels et probables dans ce numéro de Paris-Match (28/10/1961), rien sur
les corps jetés à la Seine. Rien.
Ce qui témoigne combien le vieux cliché, repris
également par la voix populaire et par une partie de la classe
intellectuelle : "on ne nous dit pas tout, on nous cache quelque
chose", vient effectivement d'une époque où cela se vérifiait... »
in Les voyageurs modèles, p. 134, 136 (2002)
Annonce dans la
presse d'une nouvelle action de l'Académie française pour lutter
contre "l'appauvrissement généralisé du vocabulaire"...
Bon, la
presse gobe ça, il suffit pourtant d’observer combien les
dictionnaires se sont enrichis en quelques décades pour cesser de
répéter ce cliché.
Mais qu'a
pensé faire l'Académie ? Eh bien dénoncer ce qu'elle appelle
les "emplois fautifs".
Ne pas dire
travailler sur
Paris, ni au niveau du
salaire mais quant au
salaire. Surtout ne pas dire pas de
souci
qui pourtant se dit plus de fois par jour qu'il y a de tweets sur la
planète... il faut dire ne vous
inquiétez pas
ou rassurez-vous !
Et quoi
encore ? Ne pas se servir de impacter
qui à tort ou à raison se développe, préférer la crise
affecte l’activité
économique et non pas l'impacte...
Ne pas utiliser le verbe gérer
mais lui
préférer affronter. Ou alors,
dire vivre ses doutes
plutôt que gérer ses doutes.
Ce dernier exemple montre
bien que ces clowns sont largués, car ce n'est pas du tout pareil.
Gérer implique un autre sens, une préoccupation contemporaine, une
position plus active.
Au fond, tout ce qui est vivant de la langue est
fautif pour cette institution qui une fois de plus croit
défendre la langue en la bridant à un état historique !
De toute façon, c'est l'usage qui l’emporte.
Bien sûr, il peut y avoir des emplois de « saison » mais
d'autres s'installent heureusement, c'est comme ça que le
vocabulaire s'enrichit. L'Académie n'y pourra rien, sauf à être
ridicule.
A l'école, les maitres font apprendre des listes de mots.
Le
mot « gaieté » par exemple, qui pourtant s'écrit
« gaîté » depuis longtemps. Et qui, depuis les
rectifications de l'orthographe de 1990, s'écrit tout simplement
«gaité».
Et «piqûre», pourquoi faut-il un accent circonflexe sur le u, demande
un élève éveillé, difficile à expliquer. On l'écrit désormais
sans circonflexe : « piqure », pour le rappel !
Oui mais les bon(ne)s maitres, tout comme d'ailleurs les gentil(le)s
correcteur(e)s d'édition ont toujours le dernier mot !
Peut-être, mais passera-t-il le cap de la génération numérique ?
« Total access », « La Blue car », deux
appellations en anglais qui viennent d'apparaitre, bon, why
not ? A quoi on pourrait en ajouter bien d'autres, par
exemple
ce « On the run » sur les autoroutes de France. C'est
joli ou efficace ou bien global, mais cela va figurer désormais sur
nos murs et nos écrans et aussi dans nos têtes.
Et pourtant, à voir le succès du mot concept des « Indignés »
de Stéphane Hessel, traduit ou pas, on voit que des marques ou des
slogans en français peuvent aussi séduire à l'international. Il y
a même un goût mondial pour les citations en français.
Le regrettable est que passer systématiquement à l'anglais,
c'est en fait habituer le français à la paresse.
Et non le porter à
l'innovation, marqueur premier de la vitalité d'une langue.
Les diners de « cons » à la télé, le
concept
(si on ose dire) de l'émission étant un diner. A ne pas regarder plus
de quelques minutes, sauf pour raison d'observation sociologique.
De « cons », parce que rassemblant une majorité d'hommes,
connus sinon pour leur qualité du moins pour leur présence médiatique,
qui ne s'écoutent pas.
Ça, qui fait que c'est con. Ils parlent l'un sur l'autre, se coupent et
s'entrecoupent dans l'étalage de leurs discours vaseux.
Surtout, et pire, ils rembarrent les quelques femmes figurantes à peine
elles parlent, et ils parlent plus fort qu'elles dès qu'elles veulent
parler. Et ce jusqu'à ce qu'elles leur laissent la parole que pourtant
elles n'avaient pas prise!
Découverte
d'une exoplanète s'ajoutant aux cent cinquante à ce jour découvertes,
3,6 fois plus massive que la nôtre, située à plus de
trente années lumière, mais une super Terre car « dans
la zone d'habitabilité d'étoiles similaires au Soleil »
. C'est la deuxième à être considérée comme ayant
potentiellement de l'eau présente à sa surface sous forme liquide.
Les astronomes ont bon espoir de découvrir d'autres planètes
rocheuses qui réuniraient les conditions pour être habitables
(CNRS).
Fait
partie de ces nouvelles vraiment intéressantes, à la manière dont
certains astronomes aiment à dire que l’espace est l’avenir des
humains. D'ailleurs pas parce que la Terre serait devenue pourrie,
mais parce que les humains ne prendront jamais leur retraite. Cela
veut dire qu'ils ne peuvent s'empêcher de courir de l'avant, en
conséquence qu'ils fileront toujours vers d’autres espaces dans
l'espace.
Une
vidéo touchante d’Albert Camus interviewé sur son adaptation des
Possédés.
Plutôt lui qui est touchant, de le voir comme s'il n'était
pas mort.
Et
drôle, quand par exemple il dit que "Dostoïevski indique qu'un
personnage se lève alors qu'il n'a jamais indiqué qu'il s'était
assis" !
Étonnant
aussi, de l'entendre parler du début à la fin au passé simple.
Toutes ses phrases sont à ce temps qui a totalement disparu de nos
jours de la langue parlée.
Étrange
encore, que pour étayer sa parole il laisse passer différents tics
ou mimiques qui paraissent vieux ou bien même un peu beauf...
Pourquoi
étrange ? Parce que ses textes ne donnent pas le moins du monde
cette impression.
La langue des SMS au
secours
des professeurs de français qui s'échinent à apprendre à leurs élèves
cette langue rendue difficile par ses irrégularités, son manque de
logique et ses multiples formes monstrueuses qui ne se prononcent pas.
Ce ne sont pas des professeurs de français en France enseignant à des
étudiants francais, dont il s'agit. Non, de professeurs étrangers
donnant des
cours de français à des non francophones qui travaillent sur des
textos, pour détendre l'atmosphère d'une certaine façon.
En effet ce langage texto, quand il garde toute sa logique, constitue
un jeu pour les apprentis francophones. Il leur fait découvrir en
profondeur la langue française en leur permettant de leur dévoiler les
difficultés sus-décrites.
Car la nécessité de compresser qui caractérise le texto, en même temps
que l'impératif de se faire comprendre, conduit à passer par une sorte
de code intermédiaire plus ou moins ingénieux.
La difficulté ensuite étant bien sûr de revenir à la langue écrite
académique.
Parlant d'académique, il faut dire que si les fers n'étaient pas si
serrés, les formes se modifieraient en douceur dans le sens de la
logique et de la simplification (et de l'information), sans que le
français risque quoi que ce soit pour sa survie, ce serait même tout le
contraire!
Marcel Gauchet, dont je trouve le
discours
dans un journal italien, fait partie de ces intellectuels experts que
les medias consultent sur la question dont ils sont spécialistes. Lui,
c'est la démocratie, et, plus précisément, la crise de la démocratie.
Deux causes à cela, selon ce « philosophe » : la
démagogie et l'individualisme.
C'est drôle parce qu'on pourrait dire tout au contraire que la
démocratie n'a jamais été aussi développée, jamais autant mise en
application en tout cas, et ce de par le monde.
Le cri des jeunes révolutionnaires à Tunis et au Caire pendant leur
mouvement de libération, c'était : nous, ce qu'on veut, c'est être
en démocratie comme à Paris, New York et Tokyo... Sous entendu :
être normal quoi !
On notera que la démagogie est un mot grec constitutif même de la
démocratie. Et on ajoutera que l'individualisme
« croissant », qui me semble à moi être une "individuation"
croissante, serait plutôt un facteur favorable à la consolidation de la
démocratie !
Donc la démocratie n'est pas en crise, elle est en développement.
Ça n'empêche que vous continuerez de le lire ou de l'entendre dire, que
la démocratie est en crise.
D’ailleurs le mot crise est certainement le mot le plus contemporain
qui soit!
Un
œil sur le vocabulaire des infos concernant la crise financière et
boursière. Le mot qui revient tout le temps, c'est marché. « Les
marchés sont nerveux, hésitent, sont méfiants, craignent la
récession...
Ou bien : le marché, ce qu'il veut, c'est être rassuré... »
On
peut clairement se poser la question de savoir qui est ce marché ?
qui sont-ils, ces marchés qui veulent et vibrent d'émotion.
On
voudrait savoir qui ils représentent, à part qu'il y a des gens qui
ont fait fortune en spéculant sur les monnaies ou sur les matières
premières, le blé, le cuivre, le café... Ou sur des chutes
boursières justement...
Pourquoi
Freedom
de
Jonathan Frantzen paru aux USA en 2010 a-t-il fait la 1ere page du
journal Libération, du 16
août?
Ce
dont on
ne peut que se réjouir, et même espérer que cela se reproduise,
avec d'autres auteurs, d'autres livres, par exemple une fois par
mois, même deux, pourquoi pas ?
A
part remplir un vide d'infos de cours d'été, il s'agissait
certainement d'annoncer la sortie de la traduction française d'un
livre qui a pour toile de fond la société américaine et qui
renvoie une image de l’Amérique proche de celle qu'en ont les
français.
C'était
plus surement une sorte d'hommage rendu aux éditions de L'Olivier
qui fête ses vingt ans d'édition. Et à Olivier Cohen, éditeur
habile et apprécié tant de la presse que des libraires, comme
l'illustrait une vitrine de la librairie La Hune à Paris, présentant
une photo de l'éditeur avec quelques-uns de ses livres mais sans
grandes photos d'auteurs.
L'info
importante à propos de ce livre Freedom
est
qu'il se serait vendu à plus de 300 000 éditions
digitales, au prix de 9 dollars au lieu de 25 en édition papier dont
il aurait été vendu 4 fois plus d'exemplaires.
Est-ce
un tournant dans l'aventure de l'édition qui basculerait ainsi du
papier au digital? Bien sûr le public américain est largement plus
équipé en liseuse numérique que
les français.
Encore
qu'on
peut « lire » désormais sur n'importe quel écran
d'ordinateur, de tablette ou de smartphone...
Possible
que ce genre de livres classé grand public, formaté à 500 pages,
avec pour ambition une peinture de la société contemporaine se vende
de plus en plus du coté digital.
Cependant,
est-ce si intéressant cette peinture appelée saga parfois, Libération parle de "roman somme",
dans la mesure où on l'a tous
les jours redondante dans la presse globale, écrite et
audiovisuelle ?
Lu en passant: « Untelle est
maîtresse
de conférences à l'Université de »...
Ce féminin en "esse" est sans doute choisi parce que le e final de
maître ne peut pas indiquer le genre de façon significative, comme dans
auteure, professeure ou ingénieure...
Bien sûr, on peut prononcer "maitreeeu" au lieu de maitr', mais cela
est clairement moins féminin que maîtresse qui fait partie de la série
prêtresse, doctoresse etc.
Cependant, on peut dire docteure, le mot doctoresse étant d'usage à une
époque où les femmes médecins étaient rares.
Reste que maitresse a un sens équivoque, celui de l'amante, qui en plus
n'a pas de masculin, maitre ne signifiant aucunement l'amant.
On peut dire aussi « une maitre de conf » ou alors carrément
changer ce nom, trouver un autre grade à défaut d'un autre poste !
Je me sens à Paris, tout en ayant
l'impression d'avoir quitté Paris.
Tous les gens de mon bloc
sont partis en vacances. Donc je suis seul. Sauf que je rencontre
trois fois par jours des amis de ces gens qui sont partis.
Des
sortes d'avatars, si on veut, qui viennent prendre le courrier,
arroser les plantes ou même tout simplement faire figures de qui
habite là d'ordinaire.
Maintenant je m'y suis habitué et je
salue tous ses avatars comme s'ils étaient les vrais habitants du
lieu!
Moi-même ne sais plus si je suis parti ou non en vacances
et, comme je le crois un peu, je me sens désormais un avatar de moi
même, si c'est possible...
Alors je vis comme en retrait du
monde, dans une sorte de bonheur d'être soi-même sans l'être tout
à fait, entouré de ces gens qui ne le sont pas non plus.
Depuis
je ne fais que me réveiller et dormir, et le reste du temps je le
passe à marcher, écouter, regarder...
Je ne fais plus de
courses et ne mange que quand c'est nécessaire.
L'autre matin la
banque m'a appelé pour me dire que je n'avais plus d'argent. J'ai
dit, pas possible, il faut donc que je parte récupérer mes
placements off shore.
Faites vite, m'a dit la personne de la
banque, le temps presse...
Oui, mais ce n'est pas le bon moment,
j'ai répondu, la bourse va mal, je risque de perdre beaucoup.
Pas
grave, elle m'a dit en riant, l'important c'est d'aller en vacances...
Les
petites librairies sont en danger, une campagne publicitaire dans la
presse est organisée pour les soutenir. Personne n'a envie qu’elles
disparaissent les unes après les autres comme c'est arrivé pour les
disquaires. Un de leurs problèmes est qu'une commande de livres
effectuée chez elles réclame généralement un délai de 8 jours
contrairement aux librairies du net qui livrent en 2 à 3 jours.
On
souhaiterait que le président du Syndicat national de
l'édition (SNE), qui est à l'initiative de la campagne de soutien,
trouve une solution pour qu'elles puissent répondre aux commandes
dans le même délai.
Un cliché qu'aiment
curieusement développer les médias eux-mêmes, est que l'on serait de
plus en plus informés mais qu'en fait on ne l'est pas du tout,
informés, voire de moins en moins.
Sous-entendu, parce qu'on nous donne à entendre ce qu'on veut bien.
Qui ? le pouvoir, semble-t-il.
Un ami l'autre soir me fait le coup : "De toute façon, on ne sait
rien, on nous dit que ce qu'on veut bien nous dire"...
Bon, je lui réponds, tu vas pas t'y mettre toi aussi ! Tu sais
bien que tu peux désormais recouper n'importe quelle information à
travers tous les médias de la terre, locaux ou internationaux, aussi
bien les officiels que les plus marginaux.
Et te faire ton opinion sur tous sujets, y compris sur ceux dont on
parlait beaucoup les semaines précédentes et dont on ne parle plus dans
le flux dominant des infos...
Car le problème c'est le flux dominant, souvent déterminé par ce que
les medias croient que les gens veulent. Et en effet les medias
insistent généralement sur ce que les gens majoritairement souhaitent
entendre.
Sinon, on découvre que la limite à l'information, c'est l'incertitude
humaine, et surtout la mauvaise foi qui en est souvent à l'origine...
Bonne nouvelle, la désactivation de l'honneur comme circonstances atténuantes des crimes de sang décidée par l'Autorité palestinienne. Il faut espérer que l'exemple soit suivi dans tous les pays où cela se pratique. Et surtout que cette « pratique » disparaisse de la liste des nombreuses barbaries qui nous viennent du passé lointain. Un père, un frère, un oncle pouvaient en quasi impunité tuer une soeur, une fille, une nièce qui avait pris la liberté d'aimer qui elle voulait, et ce pour soit-disant laver l'honneur d'une famille !
Pas un mot sur ce
blog
depuis des jours, et bien peu ces derniers mois, sans savoir si c'est à
cause de « l'affaire » du Sofitel de NY qui m'a déprimé, et qui donc
m’aurait détourné du commentaire de la réalité. Ou bien si c'est le
départ de F. dans son pays du milieu, -pour longtemps, voire pour
toujours-, qui m'a tellement attristé et m'aurait conduit à une sorte
de muetitude.
Plus sûrement, en fait il y a toujours plusieurs causes agissantes,
parce que je suis dans l'écriture d'un roman. Et que je me trouve dans
le travail de formuler une sorte d'informulé. Il s'agit d'écrire ce
dont on parle peu ou pas vraiment ou sous influence de clichés.
Cette écriture m'occupe la plupart du temps, même si je ne travaille
que quelques demi-heures par jour. Pourtant, je m'impose de la
poursuivre, s'il le faut, jusqu'à me déplacer d'un lieu à un autre,
intérieur / extérieur et retour...
Du coup, les événements des jours défilent lointainement,
m'apparaissent informes, fluides, un peu équivalents. Je les regarde
depuis ce lieu de l'écrit qui m'accroche car, au détour d'un
moment, une phrase peut surgir, inattendue, sans doute provoquée par
les précédentes, et qui va produire peut-être la survenue des
suivantes...
Le
professeur débatteur du samedi matin, sur la radio France Culture, qui
arbitrait entre catastrophisme et non cata, n'en pouvant plus à un
moment, trouve de quoi enfoncer le coin : « Et si le mal était déjà
fait ? »...
D'ailleurs en faisant semblant de poser une question, car c'est quant à
lui une certitude pour
l'école et la langue.
Une
évidence que notre éducation en général a sombré, elle qui a
réussi peu ou prou à
amener l'entièreté de la population à l'écriture, à la lecture
et à la connaissance... ce qui n'est pas rien, au-delà des revers
inévitables. Une école qui, de la maternelle à l'université, a changé
forcément, massivement changé, mais dont les échecs sont plus dûs à une
insuffisance d'adaptation à l'époque qu'à trop
de changement (voir le tout petit nombre de tableau numérique dans
les classes).
Une toute aussi évidence pour la langue française, qui
serait dégradée, quasi foutue, à travers l'exemple de
l’utilisation de la forme « sur comment » qui met hors de lui
le professeur. Cet homme ne saurait pas qu’une grande partie de
la langue s'est construite à partir d'incorrections qu'on trouve des
décades ensuite parfaitement correctes quand l'usage les retient ?...
La bonne santé d'une langue se mesure à sa capacité d'intégration des
formes nouvelles en usage, qu'elles soient correctes ou
incorrectes. Elle peut aussi se mesurer à l’épaisseur des
dictionnaires qui ne cesse de s’accroitre...
Oui,
mais si ce chef débatteur tenait (avait tenu) des arguments de ce
type, il n'aurait pas gardé son émission depuis qu'il la garde ni
ne la garderait autant qu'il la gardera. Allez savoir pourquoi !
Pourtant,
si la grande majorité des clercs d’une autre époque pointait le
ciel pour prier Dieu, désormais c'est pour voir l’univers, par
exemple à travers le télescope spatial Herschel!
Suite à des trombes
d'eau chues massivement sur le circuit automobile de Montréal, un
commentateur parle des dangers de l'aquaplannage. Parce qu'au Québec,
dit-il, on est respectueux de la langue française, sous-entendu, on ne
dit pas aquaplanning comme en France. Et pourtant aquaplannage ça
marche bien, la forme en age étant d'un usage facile.
Sauf que le respect de la langue dans la mère patrie, si j'ose dire,
consiste au contraire à ne pas inventer spontanément de mots nouveaux.
Le néologisme y est mal vu par principe (dans notre époque pourtant de
nouveautés). Donc on utilise l'anglais d'un mot nouveau tant qu'une
commission ad hoc (ce sont les
adhociens) n'a pas décrété le mot français à utiliser.
Évidemment c'est toujours trop tard, résultat on garde le mot
anglais...
Conclusion : le grand danger qu'encourt la langue française c'est
l'inertie conservatrice des académiciens de toutes catégories !
Une véritable
révolution
des connaissances sur le cerveau s'est opérée depuis une quinzaine
d'années, voire ces toutes dernières années. A savoir qu'on savait à
peu près rien avant par rapport à ce qu'on sait maintenant, même si on
est loin de comprendre ce qu'on risque de comprendre dans x années.
Parmi les « nouveautés », il y a la plasticité du cerveau. Non
seulement il peut se regénérer mais de nouvelles connexions neuronales
s'opérent sans cesse dans nos têtes. Ca veut dire que, contrairement à
ce qu'on dit, on peut changer. On peut intégrer la novation et surtout
on peut se désinscrire.
Ce qui entrainerait une plasticité de la pensée!
C'est étonnant cependant comme elle se voit peu, cette plasticité là,
dans les couloirs du monde. Mais oui quand même.
Est-ce
qu'il écrit régulièrement, me demande une cousine de ma mère qui
n'ose pas me dire tu ?... Vous écrivez tous les jours ?...
Est-ce que tu t'astreins à écrire à heure fixe ?
Oui,
écrire est mon activité première. Je suis même en général dans
une stratégie d’efficacité maximale à l'égard des occupations
de la vie ordinaire, de sorte de réserver le plus de temps possible
à l'écriture.
Mais
je ne suis pas non plus un bucheron. Je ne peux pas comme certains
travailler dès l'aube, sans arrêt, jusque vers l'heure du déjeuner
de 13H. J'ai besoin de penser, j'ai besoin de rêver. Souvent je
m’évade de mon lieu de travail pour aller avec mon notebook
m'installer dans un café ou dans un jardin. Bien sûr je pense tout
le temps que je ne travaille pas assez...
J'ai
trop besoin de vivre aussi. C'est ma revendication : écrire et
vivre !
Une
langue nouvelle se développe
qu'on peut entendre de plus en plus ici, là et là-bas, aux
terrasses de café, dans les rues et sur les radio FM spécialisées.
C'est une sorte de français mâtiné d'arabe ou bien d'arabe
dialectal dans lequel s'insèrent des mots et des expressions
françaises.
On ne sait pas ce qui déclenche le mélange des deux langues.
Certains mots surgissent parce que plus utilisés dans une langue, ou
parce qu'ils n'existent pas dans l'autre ? Peut-être davantage
de mots français se référant à la technologie ? Ce qui
est surprenant si l'on pense qu'en français c'est l'anglais qui joue
ce rôle.
On comprend qu'il y a un plaisir
manifeste à choisir à un moment de passer au français ou au
contraire de revenir à l'arabe dialectal, mais pas littéraire il
semble. Oui ça a quelque chose à voir avec le franglais pratiqué
par des français qui se servent couramment de l'anglais et qui donc,
dans les conversations, usent d'un français mâtiné d’anglais.
On peut voir là un
rapprochement des langues, inévitable, pas seulement dans le sens
des mots mais aussi dans les formes syntaxiques.
On dira que
c'est triste que les langues perdent de leur caractère ou que c'est
triste que des langues disparaissent au profit de quelques langues
majoritaires, voire d'une seul à terme?
Que les humains
parlent donc la même langue, après on verra!
On peut désormais
feuilleter
sur Google Livres, Les voyageurs modèles, un roman que j'ai écrit
avec vraiment beaucoup de passion au début des années 2000. Paru chez
Comp'Act, éditions depuis disparues (hommage et grand salut à l’éditeur
Henri Poncet), avec un accueil discret. A part une postface de Mathieu
Bénézet, un entretien (Alain Veinstein) et une lecture (Garance Clavel,
Jacques Taroni) sur France Culture, et une autre faite par moi-même à
la librairie L'Arbre à lettres de Olivier Renault, à Paris 14e...
Bien sûr il y avait eu de très bonnes réactions, de quelques lecteurs,
comme toujours. Et aussi des réactions parfois violentes, m'accusant de
n'avoir rien dit dans ces 186 pages. Ce qui est peu vraisemblable,
puisque j'y prenais le contrepied de tous les clichés de l'époque, avec
comme question première: « aimez-vous votre époque? ».
Question généralement évacuée sous l'évidence répandue selon quoi on ne
pouvait pas l'aimer.
Il y avait eu aussi cette perle d'un éditeur selon qui il y avait trop
de pensées dans ces Voyageurs modèles !
Le voici à redécouvrir, comme on le ferait sur les bancs des
librairies, en lecture limitée à 20%, depuis n'importe quel point
connecté de la planète.
Il en est de même pour La Suive et La
fiction d'Emmedée
Voici
ce: « On voit bien que l'époque n'est ni au perfectionnement
de soi, ni à l'effort intellectuel soutenu » (Brice Couturier
sur France Culture). Pour montrer comment peuvent être balancées
des phrases dont on peut dire que celui qui les rapporte ne les pense
pas au moment où il les dit. Pire, que lui et ses confrères qui se
sont habitués à les dire et à les entendre y croient sans avoir à
les penser.
À noter que ces deux assertions sont introduites par un
« on voit bien » qui écarte toute contestation. Et
pourtant !
Passons
vite sur la première assertion. Pas de perfectionnement de soi ?
Mais
c'est toute la marque de notre époque. Jamais il n'y a eu un désir
aussi répandu et partagé de se transformer, de se libérer, de
s'analyser, de s’éduquer, de se cultiver, de connaître et
partager les cultures. Jamais autant de gens n'ont fait la démarche
de prendre des cours ou de reprendre des études etc …
La
seconde est plus insidieuse. L'époque ne serait pas à l'effort
intellectuel soutenu ? Dire cependant que dans les années 1930
il était courant (comme un ancien président) de passer la même
année sa licence de lettres et sa licence de droit, ce qui serait
bien impossible désormais. Si l'on considère la compétition
existant du fait de l'arrivée massive d'étudiants, il faut
aujourdhui pour réussir des concours en passer par un effort
intellectuel soutenu comme jamais n'ont fait leurs ancêtres du XXe
siècle. Par ailleurs, jamais il n'y a eu autant de
thèses produites sur des sujets les plus divers et de plus en plus
pointus qui nécessitent des efforts soutenus pendant des années
pour en arriver en plus à des sommes qu'il faut ensuite réduire
pour être publiées. Jamais il n'y a eu autant de chercheurs, de
spécialistes, d'experts en tous sujets qui sont bien obligés d'en
passer par l'effort intellectuel soutenu pour l'être et le rester...
Oui,
mais il faut chercher ailleurs. Ce qui est visé c'est le fait que
l'on peut obtenir une information rapidement sans avoir à chercher
des jours dans une bibliothèque papier. Ce qui est mis en avant
c'est l'accusation de touche à tout parce qu'on peut traiter
plusieurs sujets en même temps à travers plusieurs fenêtres...
C'est la concentration qu'on n'aurait plus parce qu'on peut en même
temps écouter de la musique, taper sur son ordinateur, répondre à
des mails, voire visualiser des images... C'est au fond une critique
maso de l'accès facile à l'information, au savoir, aux
connaissances, à la culture et à la communication...
La présentation de
la version longue à Chaville de « On ne peut avoir écrit Lol
V. Stein et désirer être encore à l'écrire » a été assez
différente de la version donnée au Théâtre du Temps et à
Trouville. D'abord parce qu'il y avait une demi-heure de textes en
plus, ceux que j'avais écartés lors des lectures précédentes pour
les limiter à une heure.
Ensuite en raison
d'un dispositif adapté au lieu, pas de plateau du tout, un décor de
chaises, les trois comédiens (dont "une MD" et "un JPC") évoluant entre
et parmi et autour du
public pour redonner ces entretiens.
Enfin,
il y avait l'homme qui marche (Axel B.). Qui est-ce ? m'a t-on
demandé. « Je
pense que c'est moi, l'homme qui marche, enfin c'est l'auteur »
dit MD.
Le test de
Chaville a montré que les
propos en particulier sur « L'Homme assis dans le couloir »
apportent une dimension plus théâtrale et aboutissent à un acmé
émotionnel dans le déroulement de ce qui devrait devenir un
spectacle lu et interprété d’une durée de 90 à 100 minutes.
Enfin
un intellectuel, Michel Serres, académicien français, qui affirme
dans un texte de fond «Éduquer au XXIe siècle » (Institut de
France) que nous sommes en train de vivre une des plus fortes
ruptures de l'histoire. Et qui salue comme une bonne nouvelle le
« nouvel humain (qui) est né, pendant un intervalle bref,
celui qui nous sépare des années soixante-dix. »
Enfin
une personnalité de l'establishment, philosophe libre, capable de
dire que « les philosophes, dont je suis », ont failli à
leur tâche, celle « d'anticiper le savoir et les pratiques à
venir », pour faire face à cette mutation, par suite « d'une
entreprise généralisée du
soupçon et de la critique »
Ainsi
fait-il partie de ces rares personnes (dont je suis) qui observent le
monde de façon positive... Et non de ces grandes personnes qui
décrivent le monde avec défiance, par petitesse ou par habitude, et
qui en transmettent une image négative auprès des jeunes gens.
Eux
qui peuvent dire la chance qu'ils ont d'être de cette génération
à connaître les portables, les tablettes, la communication rapide
etc.
Eux
qui ne vivent pas assez l'étonnement de connaître -en tout cas en
Europe- une espérance de vie de 80 ans, un accès facile au savoir, un
monde sans guerre et sans
famine, des mariages et des enfants désirés en général, un horizon
d'univers passé de quelques milliers d'années à des
milliards maintenant...
A
quoi j'ajouterai, pour fêter le printemps, la perspective
enthousiasmante de l'émergence d'un
seul monde, une seule terre.
Le
salon du livre est surtout celui des éditeurs. Pas des auteurs qui
ne sont pas vraiment à la fête, à part quelques-uns qui signent à
tour de mains.
D'abord parce que
c'est pour le moins un lieu de mise en modestie des écrivains. En
effet face aux 50000 titres exposés, tout écrivain qui va au Salon,
Parc de Versailles, même s'il est fêté par son éditeur, est au
moins réduit au 50000éme de ce qu'il croyait être: un être
unique. Ensuite parce que les valeurs y sont inversés, c'est
la loi du chiffre qui l'emporte sur le fond du livre!
C'est donc une fête
de l'édition qui d'ailleurs a bien le droit de se fêter. Jamais
autant de livres édités, jamais autant de livres vendus, jamais
autant d'auteurs publiés, jamais autant de lecteurs, avec en plus
une expansion continue d'année en année.
Même le numérique
n'est pas un danger, la diffusion d'écrits sur le net provoquant un
surcroit d'achat de livres. Sans compter qu'elle crée un nouveau
public de lecteurs.
Ce n'est pas non plus
le salon des libraires qui pour un temps sont sérieusement
concurrencés par cette giga librairie, heureusement pour eux
éphémère.
On peut se passer de
la bousculade qu'il faut affronter le soir de l'inauguration, sans
pour autant cesser d'être écrivain.
L'aventure
de « On ne peut pas avoir écrit Lol V. Stein et désirer être
encore à l'écrire... »
(« Avoir écrit...» en plus vite) reprend avec une lecture
test de la version intégrale à l'Atrium de Chaville
(Hauts-de-Seine, près Paris), pour la 6ème journée Duras, ce samedi 26
Mars à
18 heures.
Lors des précédentes lectures, au Théâtre
du Temps et à Trouville, J'avais
choisi de proposer une version courte et avais en conséquence écarté
deux blocs
des Entretiens, notamment celui portant sur « L'Homme assis
dans le couloir ».
La réintroduction
de ces blocs semble modifier le spectacle et lui donner une dimension
plus théâtrale.
Le 26 Mars à
Chaville, en nous
redonnant l'intégralité de ces dialogues, Aurélie Houguenade, Antoine
Lesimple et Axel Bogousslavsky nous feront entendre
« MD parlant à la radio »
Journée
des femmes, plaisir de le redire chaque 8 mars, que la libération
des femmes a été une libération pour moi, en tant qu'homme,
accompagnant ma libération, de quoi? en tout cas du machisme...
Mon
espoir: que les femmes libèrent le monde, en particulier des traditions
barbares. Donc qu'elles poursuivent leur libération à
l'égard des hommes machos, toujours majoritaires sur Terre.
Ma
crainte: qu'une fois au pouvoir elles copient le modèle des hommes,
je ne le crains pas trop.
Je
redoute plus que certaines femmes adoptent le comportement des
hommes, comme les hommes étaient, machos envers leur compagne, leur
famille, leurs enfants...
Mon souhait: que
les femmes ne se comportent jamais de façon machiste, et surtout
pas avec les hommes qui ne le sont plus!
« Le
cerveau des nouvelles générations ne fonctionne plus comme par le
passé », dit l'universitaire Serge Tisseron dont la phrase a
été reprise en titre dans la presse. On imagine les réactions
simplistes de la bonne société résistante au numérique, y voyant là une
catastrophe supplémentaire ou la preuve que la modernité mène à rien.
Il ajoute
que c'est également vrai « de tous ceux qui sont gros
consommateurs de nouvelles technologies ».
Moi
je traduis cela par le mental rapide. Et pas le mental lent, comme on
peut l'observer dans certains jeux de TV, avec un certain Foucault
qui n'est ni le Charles ni l'homme du Pendule.
C'est un mental qui
fonctionne sur plusieurs « fenêtres », avec une recherche
immédiate de l'information et la possibilité d'intégration
de différents sujets... Il est alors en effet inadapté au système
d'éducation traditionnel. Encore que c'est un comble d'écrire
cela, il faut plutôt inverser l'affaire: il est clair que le
système d'enseignement traditionnel est inadapté à ces nouvelles
façons de fonctionner du cerveau.
Il
faut oser dire que cette inadaption est une source de malaise chez bon
nombre
d'adolescents d'aujourdhui. Et sans doute chez de nombreux
professeurs qui s'échinent en toute bonne foi à vouloir inculquer
les anciennes façons.
Bien
sûr, ça ne va pas vraiment dans la direction prise par les
différents ministres des immigrations du monde, mais je suis un fan
du droit du sol. Il y a en effet quelque chose d'éminemment
sympathique et humain dans le droit du sol. Et aussi de simplement
logique : On est du pays où l'on nait. Ce que l'on pourrait écrire:
« on est du pays ou l'on est » Ou encore: « on nait
du pays où l'on est ».
Il y a
d'ailleurs des quantités de belles histoires qui viennent de ce
droit du sol. Untel né(e) par hasard à tel endroit, ses parents y
vivaient ou n'avaient pas eu le temps d'en partir. Ou même, sur fond
de malheur, quand la famille s'est exilée, seule la mère a pu
partir et le père non, ou le contraire, si ce n'est un enfant resté
seul, déposé juste de l'autre côté de la frontière...
En ce
moment le droit du sol n'a pas l'air d'aller dans le sens de
l'histoire, mais l'on sait qu'on se trompe souvent sur le sens que
prend l'histoire. Ce pourrait bien être une donnée à venir le
droit du sol. Quand les populations de la mondialisation se seront un
peu plus mélangées, et bien, pour s'y retrouver, on en reviendra
peut-être au strict droit du sol...
Une tribue (sic) amazonienne isolée, filmée pour la
première fois » (Le Monde.fr du 05.02..11 / 14h 46. Survolée
par une équipe de la BBC, on peut imaginer la frayeur qu'a dû
ressentir cette petite dizaine de personnes en entendant le bruit de
l'avion puis en apercevant la machine volante passer au-dessus de
leurs têtes.
Drôle,
le commentaire cliché du journaliste de la BBC: ce
sont
les derniers hommes libres sur la terre. Comme si ce pouvait être une
liberté d'être, sans savoir pourquoi, le sujet d'une image filmée
depuis un avion d'humains en tout cas libres, eux, de survoler de
vastes espaces sans poser pied à terre ni perdre leur connexions de
communication!
Le
plus drôle étant ce "e" ajouté à tribu, nom féminin. Non
sans raison d'ailleurs car il serait en effet beaucoup plus logique
d'accoler un e à tous les mots féminins comme cela se fait
désormais pour les noms de métiers au féminin.
Et
si c'était une sorte de printemps du monde?...
Un
espoir, en réponse à ces bribes résonnant à nos oreilles: « Selon
la croyance bouddhiste, les femmes sont impures, elle ne doivent pas
parler aux moines »... « La condamnation de la lapidation
est une insulte au Prophète »... La notion de « dangerosité
sociale prédélictuelle » réapparue à Cuba, en fait toujours
utilisée pour mater les opposants... Plus de 60 personnes pendues en
Iran pour crime divers depuis le début de l'année, soit deux par
jour...
Et
si c'était une sorte de printemps du monde qui se déclenchait à la
suite de la « révolution » tunisienne?... On
se prend en effet à espérer que le mouvement se poursuive dans tous
les pays arabes, mais aussi dans tous les pays fermés. La Corée du
nord, la Birmanie et l'Iran, et Cuba. Et la Chine aussi. Mais encore
le Belarus, on en oublie toujours de ces pays fermés... Il y en
d'autres en Afrique...
Monique
Canto-Sperber, directrice de l'ENS Paris, explique dans une tribune (Le
Monde) pourquoi elle a annulé un meeting pro-palestinien dans son
école. Bon, l'explication parait convaincante et sa décision
compréhensible. Oui, mais en fin de démonstration, elle glisse la
petite phrase symptomatique de la classe intellectuelle française en
place:
« Pourquoi n'a-t-on pas mentionné le combat que mène l'ENS pour la
défense des valeurs liées au savoir, à la recherche et à la qualité de
la transmission, aujourd'hui bien malmenées? »
En quoi il y aurait à les défendre, ces valeurs? A continuer de les
promouvoir, sans nul doute! Et pourquoi les voir "malmenées" alors
qu'elles n'ont jamais autant été mises en avant?
Aucune autre époque n'a autant accru le savoir, développé la recherche,
privilégié la transmission, ne serait-ce que par l'archivage généralisé
et la facilité « inouïe »de consultation des textes du passé.
Ce qui est malmené c'est le savoir ancien par le savoir qui s'accroit.
Comment en serait-il autrement d'ailleurs puisque certaines des
connaissances les plus importantes de notre époque ne datent parfois
que de dizaines d'années, et même de quelques années seulement
Cartonner,
pour une grande exposition (genre Monet au Grand palais), ça veut dire
que des gens font la queue pendant des heures, dans des conditions
plutôt humiliantes. Les gens pensent que ça vaut la peine et les
organisateurs en sont contents car leur succès se mesure à la longueur
des queues et/ou à l'ampleur du temps d'attente.
Moi je voudrais bien que, comme les collections du Centre pompidou,
toutes les expos soient mises en ligne, même si ce n'est pas pareil, en
tout cas pour ceux qui n'ont pas envie de pratiquer ce sport-là, le
queueing!
Pour Céline, l'écrivain!
Pour cette langue écrite qu'il a inventée.
Bon, je n'aime pas toujours le bonhomme Céline, non seulement en raison
de ses pamphlets antisémites, mais aussi parce qu'il disait des
conneries en général dans ses entretiens, des conneries de beauf.
Cependant Je le défends contre l'avocat Serge Klarsfeld qui s'indigne
qu'il fasse partie - à l'occasion du 50e anniversaire de sa mort - des
personnalités incluses dans « le recueil 2011 des célébrations
nationales ».
Je le défends d'autant qu'à ma connaissance il n'y a pas de discours
antisémite dans ses grands romans.
Et puis, sans que cela justifie rien, personne ne sait plus aujourd'hui
que la France globale des années 1930/50 était « légèrement »
antisémite, y compris dans le langage de tous les jours.
Tout récemment, la science nous a confirmés/appris qu'il n'y avait
qu'une seule race humaine. C'est une nouveauté qui aurait pu clouer le
bec de Céline.
Présentement il nous faut faire attention à des interdictions ou
condamnations qui comme telles pourraient nous entrainer tous vers
l'abîme.
Ainsi tout récemment Stéphane Hessel a été invectivé dans certains
milieus, de façon tout à fait inacceptable selon moi, en raison de ses
prises de position sur le conflit israélo-palestinien ("Mon indignation
à propos de la Palestine") figurant dans son livre
« Indignez-vous! ».
Un
idéal répandu est de se remettre à lire les classiques. Le
philosophe Michel Foucault se sachant près de la mort relisait
Sénèque, d'autres aspirent à la retraite pour avoir le temp* de
lire les textes bibliques.
Yv-No
reprend pour son stage les textes classiques, tous les grands textes
qu'il aime. Et pas les textes contemporains, qui ne sont que rideau
de fumée dit-il. Ce qui est possiblement vrai, ne serait-ce que
parce qu'il faudrait traverser ce rideau de fumée pour y apercevoir
quelques textes réellement contemporains...
Hélas
cependant, reprendre les textes classiques est sans doute la
meilleure façon de ne rien comprendre au temp présent, en ce que
par définition il n'est pas présent dans ces textes et ne pouvait
l'être.
Or, exceptionnellement, dans l'histoire jusqu'alors
des humains, des transformations majeures sont intervenues, pour la
première fois on a découvert la matière dont nous sommes, quitté la
terre, des engins sont sortis du
système solaire... et par exemple le mental rapide d'aujourdhui
n'est pas dans ce passé...
Bien
sûr on peut lire les textes classiques pour le plaisir ou pour la
connaissance du passé. Mais si l'on tient à comprendre notre temp,
alors il faudrait les lire en cherchant le temp contemporain par
défaut, en en cherchant l'absence. Et non en se félicitant de son
absence...
(*Pas
de s à temp ici, parce qu'il faudrait le garder pour le pluriel, id
pour le corp)
On
s'est rapproché des faits
divers au point de croire assister à leur multiplication. Pourtant
non, en tout cas les meurtres ont tendance à diminuer, c'est une
tendance de fond en France depuis plus d'un siècle. Ils ont en effet
légèrement diminué en nombre par rapport au début du XXe siècle,
malgré un doublement et plus de la population.
Mais la connaissance
immédiate et complète des faits divers entraine à en être
rapproché à travers des réactions d'indignation, de compassion ou
d'affliction. On est désolé de la mort de telle ou tel à l'autre
bout de la terre, on enrage de la violence de barbares sans
conscience ou de régimes débiles, on est affligé par des vies qui
sont brisées.
Du coup ces faits divers nous
apparaissent de plus en plus comme provoqués par des sortes de bugs
de scenario...
Il
faut s'indigner, dit Stéphane Hessel. C'est certainement bien et utile
d'avoir cette capacité-là. Mais on peut aussi s'indigner de tout et de
n'importe quoi, à tort et à travers.
Par exemple, Il y a des adultes qui s'indignent du comportement des
jeunes gens. Sur Facebook, beaucoup s'indignent régulièrement à propos
d'informations qui se révèlent être fausses.
Et puis on peut s'indigner que des humains dorment de nos jours dans la
rue et que cette indignation, largement partagée, ne donne pas grand
chose. Pareil si on s'indigne du fait que des femmes sont pendues en
Iran etc.
Il peut y avoir aussi des indignations contradictoires, ainsi des gens
s'indignent que la burqua soit portée et d'autres qu'elle soit
interdite etc.
Il faut résister, résister dit Unetelle, mais il y a des gens qui
résistent contre ce que vous croyez, vous, être positif. Ainsi certains
font de la résistance contre Wikipédia quand d'autres y voient la
continuation de l'entreprise de Diderot.
Voyez tous ces gens de l'histoire qui ont résisté aux innovations avant
de s'y mettre malgré tout.
Qui était en résistance? Galilée et Pasteur etc. Ou ceux qui
s'opposaient à eux?
Du coup ce peut-être imbécile de résister pour résister
En fait oui, il faut s'indigner, mais ça ne suffit pas. Ainsi on peut
s'indigner que soient remis en cause les acquis de 1945, notamment sur
la sécurité sociale. Mais il faudrait certainement aussi en venir à la
libération de la santé, à mettre en avant ce qui conduit à la maladie,
de sorte que chacun prenne en charge sa santé, autant que possible,
comme cela est en train d'apparaitre via internet...
Il n'empêche qu'il faut savoir résister. A l'occupant, au dictateur, au
harceleur, sans doute. A l'inertie, à l'injustice, à la bêtise...
Sachant le risque de se tromper, et même de s'entêter!
A une autre époque, fin 19e / début 20e -ou même à toutes autres époques- les fuites de WikiLeaks auraient provoqué un ou plusieurs conflits armés...